Interview de aAlex et Delfine du blog Issekinicho
Le 22/04/2014 à 06h22 - Culture japonaise
Nous avons le plaisir de recevoir aujourd'hui aAlex et Delfine, 2 réels passionnés du Japon, qui ont eu la chance de pouvoir y vivre pendant un petit bout de temps. Du coup, leurs récits, sur leur blog Issekinicho ont une touche de réalisme des plus intéressante. Si en plus de celà vous êtes fan d'illustration, vous allez être gâtés !
aAlex et Delfine bloguaient chacun de leur côté avant de décider de fusionner leurs blogs. Une bonne idée soit dit en passant, ce qui nous permet de bien apprécier le style de chaque auteur, avec ses sensibilités propres...
Bref, un blog qui fait partie des incontournables sur le Japon, et que vous vous devez de lire au oins une fois dans votre vie. Et pour en savoir un peu plus sur les auteurs, ça se passe par ici !
Bonjour aAlex, bonjour Delfine. Votre blog "Issekinicho" fait partie des blogs référence sur la culture Nipponne. Mais avant de parler du blog, parlons de vous... Qui êtes-vous?
Bonjour, nous sommes un couple d’illustrateurs français, nous sommes partis vivre au Japon pendant 2 ans (en 2011 et 2012). Pendant ces 2 années nous avons publié sur notre blog, issekinicho.fr, des anecdotes en BD et des photos pour partager nos découvertes, nos ressentis, nos moments de joie, nos galères, nos balades, nos plats préférés… bref, notre quotidien japonais.
Issekinicho est une pépite d'informations sur le Japon... et en même temps un OVNI... Si je ne m'abuse, il s'agit de la fusion de 2 blogs (aalexblog & blogdelfine). Quelles sont les raisons qui vous ont poussé à tenir un blog commun ? Et ça veut dire quoi Issekinicho ?
En effet, on tenait chacun notre blog depuis 2004. On y postait des illustrations, des petits strips BD… Quand on a décidé de partir, on a réfléchi à l’avenir de nos blogs parcqu’on voulait vraiment partager nos expériences et notre quotidien au Japon. On a trouvé qu’il était plus intéressant de travailler à 2 sur un même blog afin d’avoir un contenu plus régulier et plus riche. Deux points de vue permettent d‘avoir des sujets et des approches plus variés. On s’est mis à la recherche d’un nom pour ce blog à 4 mains, on a fait des listes de mots, on a essayé des titres avec le mot « japon »… ce qui n’a pas donné de résultats très convainquants. Dans un podcast qui traitait des expressions japonaises , on a alors entendu l’expression « isseki nicho » (= faire d’une pierre deux coups). On a trouvé que ça sonnait bien et que ça correspondait au principe de notre blog : 1 blog / 2 bloggeurs.
Vous êtes tous les deux illustrateurs, dans 2 styles bien différents. Comment ça se passe au Japon, pays des mangakas, quand on est un illustrateur français. La "French Touch" a la côte ?
Le Japon est un pays qui utilise beaucoup l’illustration dans la communication, la publicité… Il n’est pas étonnant de voir des illustrations connotées “jeunesse” dans des publicités destinées aux adultes.
Le style européen est assez apprécié. Il y a aussi une grosse influence de l’illustration américaine des années 60.
On a d’ailleurs fait une rubrique pour présenter le travail d’illustrateurs japonais. Nous concernant, on a surtout continué à travailler avec nos clients habituels en France ( magazines et maisons d’éditions jeunesse ). Pour travailler en tant qu’illustrateur au Japon, surtout dans le milieu de la publicité, il est impératif d’avoir un agent. Nous avons eu de très bons contacts avec des agents japonais mais nous avons choisi de ne pas travailler avec eux pendant ces 2 ans.
Vous avez publié 2 albums (Tokyo Ohanami et Neko Land), pouvez-vous nous en dire un peu plus la dessus ?
Lors de notre retour en France, nous avons mis en place une souscription pour réunir des fonds et auto-publier ces 2 livres. Le principe était simple : s’il y avait assez de précommandes, on lançait l’impression, sinon on remboursait tout le monde. La souscription a bien marché et nous avons publié Tokyo Ohanami et Neko Land.
Depuis, nous avons dépassé le cap de l’auto-publication et nous avons créé une vraie maison d’édition, nous avons rejoint un groupe de distribution qui permet à nos livres d’être disponibles en librairies et grands enseignes : FNAC, Cultura, Furet du nord…
Nous publions maintenant le travail d’autres auteurs ayant une approche intéressante sur le Japon et l’Asie. Par exemple, Jordy Meow avec le livre Nippon no Haikyo – Vestiges d’un Japon oublié, qui présente son travail d’exploration urbaine dans tout le Japon, le menant jusqu’à l’île de Gunkanjima. Mais aussi le livre Corée du Nord – Escale photographique, un récit de voyage en photo à travers la Corée du Nord, de Pyongyang à la DMZ. On essaie de garder un rythme de publication de 2 ou 3 titres par an.
Le prochain est prévu pour septembre 2014, un livre collectif… mais nous n’en dirons pas plus pour l’instant !
Vous êtes rentrés de votre périple au Japon en Octobre 2012, mais depuis, vous continuez à alimenter ce blog. L'expérience a été riche j'imagine pour continuer à publier presque 2 ans après vos souvenirs du Japon... Alors, ce retour en France après ce déracinement de 2 ans, pas trop compliqué ? Pourquoi être rentrés? Vous avez pour objectif d'y retourner vivre un jour ?
Oui, nous avons encore beaucoup à raconter sur ces deux années car il faut du recul pour parler de certaines choses.
Notre retour en France n’a pas été très compliqué car notre "maison" tenait dans 2 valises et 2 sacs à dos ! En fait, on n’a pas trop eu le temps de se rendre compte qu’on était rentrés car on a beaucoup travaillé avec la sortie des livres, des commandes d’illustrations, les recherches d’appartement, etc….
Nous n’avions pas le projet de nous installer à long terme au Japon, on savait très bien que cette aventure serait éphémère. Notre projet initial était d’y rester 1 an, mais avec beaucoup de chance, on a réussi à décrocher un visa d’un an supplémentaire. On aurait été déçus de devoir rentrer au bout d’une seule année, car on commençait alors seulement à prendre nos marques et nos finances ne nous avaient pas permis de beaucoup voyager.
Revenir en France nous a permis de travailler sur notre projet de maison d’édition.
Retourner au Japon, c’est dans nos projets, mais plutôt pour des vacances !
Quel est le meilleur souvenir que vous gardez du japon ?
aAlex : Le simple fait de se balader dans la rue en vélo est l’un de mes meilleurs souvenirs.
Delfine : L’ascension du mont Fuji, intense mais l’arrivée au sommet est très gratifiante.
Et le moins bon ?
aAlex : L’administration, tout aussi bornée qu’en France et la barrière de la langue n’arrange pas les choses.
Delfine : La descente du mont Fuji et le retour en train, morts de fatigue et couverts de poussière, dans une chaleur étouffante…
Est ce que vous parlez japonais ?
On était totalement débutants à notre arrivée au Japon, alors on a pris des cours. D’abord dans une école franco-japonaise, c’était très appréciable d’avoir une partie des cours en français. Ensuite dans des associations de quartier avec des japonais bénévoles (retraités, femmes au foyer…) Là ,par contre, les cours étaient entièrement en japonais ce qui nous a forcé à progresser ! Notre niveau nous permet maintenant de nous exprimer simplement et de nous déplacer dans tout le pays sans grandes difficultés (louer une voiture, réserver un hôtel ou un bus sur des sites uniquement en japonais… ) Mais de là à tenir une conversation soutenue il y a quand même encore du boulot et malheureusement, on commence à oublier car on ne pratique plus assez…
Votre ville préférée au Japon, c'est...
…pas une question facile... :-)
Delfine : Je dirais Kumamoto dont j’ai bien aimé l’ambiance. C’est une ville assez verte avec un très beau château et des bons ramen.
aAlex : Je dirais Tokyo, mais il faudrait préciser les quartiers car c’est très vaste. Suginami-ku et Nakano-ku sont très sympas avec pas mal de petites villes comme Nakano, Koenji et Kichijoji. Tokyo est une ville qui m’a toujours surpris pendant ces 2 années. Toujours une nouvelle matsuri, toujours un nouveau point de vue à trouver depuis le haut d’un immeuble.
Auriez-vous quelques conseils à donner aux personnes qui souhaiteraient s'installer au Japon ?
Tout d’abord, avoir un bon niveau de base en japonais permet d’éviter beaucoup de situations compliquées. Être français au Japon, bien sûr, ça a la côte, mais ça n’ouvre pas toutes les portes pour autant ! Des français au Japon, il y en a déjà plein et il ne faut pas s’imaginer être un pionnier.
Concernant le boulot, pour mettre toutes les chances de votre côté, mieux vaut avoir des pistes et se construire un réseau avant d’arriver sur place. Et avant tout, ne vous faites pas de fausses idées : le pays a plein d’aspects positifs mais aussi plein d’aspects négatifs qui apparaissent avec le temps.
La culture manga de Delphine étant proche du néant, cette question est posée à aAlex... Goku ou Vegeta ?
aAlex : Végéta, mais sans la moustache ! Disons que j’aime particulièrement l’acteur qui double Végéta, Éric Legrand, qui prête également, entre autres, sa voix à Seyar dans les Chevaliers du zodiaque. Un grand monsieur, que j’ai d’ailleurs eu l’occasion de rencontrer en 2012 au Toulouse Game Show.
Delfine : Hey, depuis j’ai quand même lu tout Taniguchi, Thermae Romae et même Doraemon en vo japonaise !
Parlons cuisine à présent... Plutôt baguettes ou doigts pour vos sushis ?
Sans prendre trop de risques : baguettes… On ne maitrise pas encore assez pour tenter la dégustation avec les doigts !
Sushi ou Maki ?
Ramen ! :-)
Parce qu’il y a des milliers de petits restos à ramen partout dans le Japon et que la recette est à chaque fois différente ! C’est vrai que les sushis et les makis sont la première spécialité qui vient à l’esprit quand on pense à la cuisine japonaise mais finalement, au Japon, on en a mangé très rarement. On a dû en manger 2 ou 3 fois dans des kaitensushi ! Pour la cuisine de tout les jours, on préparait plutôt le riz en « Don » ( bol avec du poisson ou d’autres ingrédients dessus ) ou en « Karé » ( Curry japonais ) Sinon, on adore le Futomaki, un énorme maki avec plein d’ingrédients, préparé uniquement pendant la fête du Setsubun le 3 février.
Thé ou saké ?
Umeshu !! (alcool de prune) Avec nos colocs, on a même produit notre propre cuvée avec les prunes du jardin de la maison dans laquelle on habitait !
Merci beaucoup pour cette interview. Est ce que vous avez quelque chose à rajouter pour conclure ?
Allez jeter un œil à notre blog, feuilletez nos livres sur le site de notre maison d’édition. Et pour nous soutenir, n’hésitez pas à en parler autour de vous ou à demander à votre bibliothèque de faire l’acquisition de nos livres.